Combien ça coûterait vraiment de lâcher Microsoft et Google ?

Posté par
Cécile G.
Le
26 Nov
.
2025
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L'État français veut que ses administrations et écoles publiques se détournent de Microsoft et Google.

Pourquoi ? À cause du fameux Cloud Act américain qui permet aux autorités US d'accéder aux données hébergées par ces géants, même quand elles sont stockées dans des serveurs européens.

Mais concrètement, qu'est-ce que ça implique de tourner le dos à Office 365 et Google Workspace ?

C’est loin d'être une banale question de budget, voire même pas du tout.

La facture qui fait mal (mais pas pour les raisons ordinaires)

Les licences Microsoft ou Google, vous les connaissez.

Entre 10€ et 25€ par utilisateur et par mois selon les formules.

Les alternatives européennes ? Elles existent dans des fourchettes de prix assez proches :

- Nextcloud tourne autour de 15 à 22€ par utilisateur et par an;

- OnlyOffice propose des tarifs similaires,

- BlueMind se positionne aussi sur des fourchettes compétitives.

Sur le papier, on pourrait économiser. Sauf que le vrai coût n’est pas tant lié à la licence choisie.

Le budget explose ailleurs :  la migration. Elle mobilise vos équipes IT pendant des semaines, voire des mois.

Il faut réaliser un audit de tout l'existant, cartographier les données, identifier ce qui part et ce qui reste en archives.

Puis vient la mise en application du plan de migration : emails, calendriers, fichiers partagés, historiques de conversations.

Chaque application métier connectée à Microsoft ou Google doit être revue.

Votre CRM discute avec Outlook ? Votre outil de facturation s'appuie sur Google Sheets ? Il va falloir re-câbler tout ça.

Le chantier technique qu'on sous-estime

Migrer vers une solution européenne, c'est souvent migrer vers de l'open source.

Nextcloud, OnlyOffice, BlueMind sont tous des outils solides mais qui demandent des compétences que vos équipes n'ont peut-être pas.

L'auto-hébergement implique de dimensionner correctement vos serveurs, de sécuriser vos installations, de maintenir les systèmes à jour.

Avec le cloud américain, tout transite par des infrastructures dimensionnées pour l'échelle planétaire. En local ou sur des serveurs européens de taille plus modeste, vous devrez peut-être upgrade votre connectivité.

Côté intégrations, il va falloir faire des concessions. Microsoft et Google ont passé des années à tisser leur toile.

Les solutions européennes proposent aussi des connecteurs, mais moins nombreux, moins matures.

Il faudra développer des passerelles custom, créer des scripts d’automatisation, bidouiller pour que tout communique. Ça prend du temps, donc de l'argent.

L'humain, le vrai nerf de la guerre

Vos collaborateurs sont habitués à Word, Excel, PowerPoint. Ils connaissent Gmail par cœur, ils ont leurs raccourcis Teams, leurs workflows rodés.

Basculer sur LibreOffice, OnlyOffice ou Nextcloud Office, c'est casser ces automatismes. Même si les interfaces se ressemblent, les petites différences agacent. Et quand les gens sont agacés, la productivité chute.

Former les équipes, ça coûte. Sans correctement traiter cette étape, vous augmentez les risques de shadow IT : les gens qui continuent à utiliser leur compte Gmail perso en douce parce que "c'est plus simple".

La résistance au changement n'est pas un mythe. Dans les administrations, où les outils numériques sont déjà source de frustration, imposer une migration peut créer des tensions.

Il faut communiquer, expliquer le pourquoi, valoriser les bénéfices (souveraineté des données, conformité RGPD). Bref, ça demande un vrai projet de conduite du changement.

Les alternatives existent vraiment

Le paysage européen des outils collaboratifs s'est considérablement enrichi.

Nextcloud couvre le stockage et le partage de fichiers avec une approche auto-hébergée.

OnlyOffice propose une suite bureautique collaborative compatible avec les formats Microsoft.

BlueMind se concentre sur la messagerie professionnelle. Des consortiums français comme Hexagone ou W'Sweet assemblent plusieurs briques open source pour créer des suites complètes.

Certaines organisations ont sauté le pas. Des collectivités territoriales expérimentent des environnements mixtes.

Ces solutions sont matures, sécurisées, certifiées SecNumCloud pour certaines.

Elles couvrent les besoins essentiels : email, calendrier, édition de documents, visioconférence, stockage cloud. Mais elles demandent un engagement.

On ne remplace pas quinze ans d'écosystème Microsoft en trois mois.

La vraie question à se poser

Est-ce que ça vaut le coup ? Ça dépend de vos priorités.

Si la souveraineté des données est critique pour votre activité, si vous manipulez des informations sensibles, si vous êtes une collectivité soumise à des obligations réglementaires renforcées, alors oui, migrer est pertinent.

Le coût initial se justifie par la maîtrise retrouvée. Pour une PME lambda sans enjeux stratégiques particuliers, le calcul est moins évident.

Le confort des outils Microsoft ou Google, leur intégration parfaite avec tout l'écosystème numérique actuel, leur fiabilité éprouvée : c'est un gage de valeur. Se compliquer la vie pour un principe peut sembler disproportionné.

Le débat sur la souveraineté numérique ne se résume pas à un tableur Excel.

C'est un choix stratégique qui engage l'organisation sur le long terme.

Lâcher Microsoft et Google, ça coûte cher et même si cela représente de nombreux aménagement il paraît qu'impossible n'est pas français.